Originaire d’Amos, Sasha Baga enflamme la scène drag montréalaise depuis plus de dix ans. Flamboyante, charismatique et colorée, elle s’est autoproclamée chonky barbie de Montréal : « Sasha est très girlie, très rose bonbon, mais c’est une femme en chair. Mon personnage célèbre la diversité corporelle », explique-t-elle. Diversité corporelle, mais diversité de genre aussi, puisqu’en tant que femme trans, elle cherche activement à promouvoir la place des femmes sur la scène drag. Performeuse incroyable, toujours désireuse de surprendre et de faire rire les gens, elle n’est pas passée inaperçue lors de son passage en Abitibi-Témiscamingue à l’été 2022. Zoom sur le séjour hors normes d’une drag queen abitibienne jusqu’au bout des (très longs) ongles.
Aventure 2: l'école du Rang II
Après avoir fait voyager Sasha dans la faune et la flore régionales, c’est un saut dans le temps qui lui est proposé pour la deuxième partie de son séjour en sol témiscabitibien. Ainsi, c'est au Musée École du Rang II d’Authier qu'on se rend cette fois. L'endroit accueille les visteur.euse.s dans le bâtiment même qui a reçu les enfants du village de 1937 à 1958. On y découvre le mode de vie (peu enviable) de l’institutrice, le quotidien des élèves et l’emprise de l’Église catholique sur le domaine scolaire.
Dès notre arrivée, Rachel, la directrice actuelle de l’endroit, nous accueille avec ses guides. Guillaume et Johanne se chargent de nous présenter les lieux dans les moindres détails. Cependant, avant de débuter, il y a une transformation à opérer et elle ne se déroulera pas n’importe où.
Afin d'enfiler son costume du jour, Sasha a droit aux appartements. C’est-à-dire qu'elle le droit d'utiliser la minuscule chambre de l’enseignante. Après un moment, elle en ressort vêtue d’une robe pailletée pour le moins révélatrice. Elle est chaussée de talons vertigineux et elle est coiffée d’une perruque d’un jaune éclatant. La cerise sur le gâteau; elle porte, sur le bout du nez, des lunettes roses en forme de cœurs.
Sasha et les années 40; un grand contraste
Effectivement, avec Sasha on est loin de l’enseignante des années 1940. Guillaume nous décrit le quotidien strict et modeste de la maîtresse d'école; pas le droit d’être mariée, pas de robe de plus de deux pouces au-dessus des chevilles, aucun « arrangement » dans les cheveux, pas de vêtements colorés, pas d’alcool, pas de cigarette, pas de fréquentations. « C’est vraiment, pour 10$ par semaine, de la pourriture! », s’exclame Sasha outrée.
Puis, elle continue de découvrir les lieux avec fascination à travers les meubles et les objets d’époque. Elle s’étonne entre autres d’apprendre que les enseignantes de l’époque s’adressaient simultanément à des élèves de sept niveaux scolaires différents. De surcroît, l'enseignante était souvent à peine plus âgée que les plus vieux élèves. De ce fait, l'exercice de l’autorité était plutôt ardu.
Ainsi, Guillaume et Johanne sont de véritables mines d’anecdotes et d’information. Pour sa part, Rachel se montre extrêmement enthousiaste envers l’avenir du musée. La directrice a le développement touristique et de rassemblement à cœur.
Il n’en demeure pas moins que le contraste entre le mode de vie des enseignantes de l’époque et celui de Sasha est particulièrement vif. « J’ai vraiment appris des choses sur les histoires qui ont façonné l’Abitibi-Témiscamingue. C’est important de savoir d’où on vient, de constater le progrès des droits des femmes » affirme-t-elle.
Sasha Baga voyage dans le temps à l'École du rang II
Pourquoi faire de la drag en région
Une fois la visite conclue, l’équipe se rend au Rest’eau du Quai question de casser la croûte et de combler le craving de cornichons frits qui accable Sasha depuis la veille. Ainsi, c'est le ventre plein et l'esprit charmé par la bonne humeur du personnel que nous retournons en direction du village d’Authier. Direction: théâtre d’été.
« Les gens étaient tellement pas prêts, mais ça a quand même été bien reçu, j’étais vraiment agréablement surprise! », souligne Sasha. Certes, elle garde un excellent souvenir de l’accueil des gens dans la région.
« Je veux que les gens comprennent ce qu’est l’art de la drag. C’est pas juste un monsieur qui se déguise en madame, on n’est vraiment plus là-dedans. C’est du théâtre, c’est faire rire les gens et dépendant du contexte, ça peut vraiment s’adresser à tous les âges parce qu’il y a vraiment une grande variété de types de drags .»
SASHA BAGA
« Dans les dernières années, ce qui me motive beaucoup, c’est justement de me rendre dans les régions un peu moins familières avec l’art de la drag et d’éduquer les gens ». Selon elle, même si les réseaux sociaux sont le lieu de « commentaires abominables », quand elle se rend sur place, par exemple dans le cadre de Fierté Val-d’Or, elle trouve surtout beaucoup d’amour et d’ouverture ainsi que des enfants et des parents heureux de la voir.
« Je veux que les gens comprennent ce qu’est l’art de la drag. C’est pas juste un monsieur qui se déguise en madame, on n’est vraiment plus là-dedans. C’est du théâtre, c’est faire rire les gens et dépendant du contexte, ça peut vraiment s’adresser à tous les âges parce qu’il y a vraiment une grande variété de types de drags », précise Sasha. Comme l'illustrent les photos, son passage dans la région a été un terrain de jeu fertile à l’accomplissement de cette mission!
Avec Sasha c'est jamais fini !
Depuis son aventure témiscabitibienne, Sasha n’a pas chômé. Présentement, on peut la voir coanimer l’émission La drag en moi sur les ondes de Canal Vie. En plus de chauffer régulièrement les planches du Cabaret Mado et du Drague de Québec où elle est animatrice résidente. Cet été, elle pose ses valises à Los Angeles pour le DragCon et participe à plusieurs productions dans le cadre de Fierté Montréal. Aussérment, elle ne négligera pas sa région d’origine, puisqu’elle prend part à la prochaine édition de Fierté Val-d’Or, du 1er au 4 juin prochains. Il semble que les aventures de Sasha en Abitibi-Témiscamingue ne soient pas tout à fait terminée!