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Musée École du Rang II: Un saut dans le temps

Située sur le Rang II (surprise!), à Authier, cette ancienne école a accueilli une cinquantaine d’élèves par année entre ses murs, de 1937 à 1958. Aujourd’hui reconnue comme un monument historique et détentrice du statut officiel de musée depuis un peu moins d’un an, l’institution accueille les visiteurs pour leur offrir un véritable saut dans le temps.

En nous dirigeant à travers les différents espaces et leurs nombreux artéfacts – salle de classe meublée d’anciens pupitres, latrines, appartements de l’institutrice avec foyer, articles domestiques et revues d’époque – les guides nous instruisent sur les conditions de vie et d’enseignement des enfants du village et de leur enseignante, souvent à peine plus âgée que les étudiants de dernière année.

Regard surprenant sur une époque pas si lointaine

Les conditions de travail offertes aux institutrices de l’École du rang II datent d’il y a moins de cent ans, mais ont pourtant de quoi choquer le visiteur. Souvent de jeunes femmes (on dirait même, de nos jours, adolescentes) venant à peine d’achever leur dernière année d’école élémentaire sans plus de formation, celles-ci enseignaient un ou deux ans – rarement plus – avant de se marier, après quoi elles n’étaient plus en droit d’exercer leurs fonctions.

Avec ses appartements situés directement entre les murs de l’école, ses sorties limitées et ses comportements surveillés, on pourrait affirmer sans exagération que l’institutrice était vivait dans des conditions infantilisantes et paternalistes. La découverte de ce site historique est ainsi une occasion de se sensibiliser également au chemin parcouru par les femmes pour la défense et l’évolution de leurs droits. Le visiteur sera aussi étonné de constater le, voire les, mondes de différence entre les méthodes d’éducation employées à l’époque, alors que le châtiment corporel était monnaie courante, ainsi que la mainmise de l’Église catholique et ses représentants sur le secteur académique.

Le contrat d'une enseignante en 1910 montre bien les conditions difficiles qu'on imposait aux institutrices des Écoles de rang au début du XXe siècle.

Une histoire encore vivante

Au-delà de la qualité de la visite offerte par les guides et du caractère authentique du bâtiment, l’École du rang II se démarque par sa jeune existence. En effet, étant donné son histoire relativement récente, plusieurs témoins clés de ses années d’opération (principalement d’anciens élèves et d’ex-institutrices) sont encore en vie et ont eu l’opportunité de revisiter les lieux pour transmettre leurs souvenirs aux employé.e.s actuels, qui se font un plaisir de les relayer.

C’est le cas de Gisèle Bergeron, une ex-institutrice qui, jusqu’à son décès, se rendait chaque année visiter les lieux. C’est elle, d’ailleurs, qui a transcrit au tableau le programme pédagogique, un texte que l’on conserve avec soin depuis son inscription. On nous raconte d’ailleurs que Madame Bergeron aurait trouvé l’amour à même l’école, auprès du commissaire venant faire sa ronde quelques fois par année, comme quoi on trouvait aussi, à travers l’austérité, quelques rayons de lumière.

Personnage de l'institutrice à l'École du Rang 2 à Authier, en Abitibi-Ouest, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue.

Johanne, guide sur les lieux depuis 28 ans, parle de son école avec une passion et un attachement absolument contagieux. Originaire d’Authier, fille d’un homme ayant fréquenté les lieux, Johanne est émotionnellement liée à l’endroit et ne se lasse pas des rencontres découlant de son travail : « J’aime cette école-là, j’aime travailler, j’aime recevoir le monde, parler avec le monde, surtout les personnes âgées. Nous, on en connaît, mais eux ont vécu des affaires, des anecdotes », affirme-t-elle. Si elle est une source intarissable de savoir sur l’école et son histoire, elle prend toutefois la peine de souligner le talent et l'intérêt des guides plus jeunes pour l'histoire des lieux et sa transmission.

Des projets d'avenir pour conserver le passé

Rachel Barbe, directrice générale du Musée École du Rang II aborde l’avenir avec enthousiasme. Elle compte bien garder son institution vivante et assurer le devoir de conservation de la mémoire historique régionale qui y est lié. Déjà depuis deux ans, chaque samedi d’été est l’occasion d’un atelier créatif durant lequel un.e artiste d’ici partage son savoir avec les participant.e.s. Ces ateliers, qui ne cessent de gagner en popularité, sont l’occasion pour les visiteurs d’investir les lieux dans un contexte différent et rassembleur, renforçant le sentiment d’appartenance.

Autre chantier prévu pour être mis en œuvre à l’automne prochain, le projet L’école vous rend visite s’inscrira dans le cadre d’un partenariat avec le CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue. Une personne personnifiant l’institutrice se rendra dans l’ensemble des CHSLD du territoire régional afin de faire vivre aux résident.e.s un véritable retour dans le temps. En effet, elle les invitera à visiter les installations de l’ancienne école à l’aide de casques de réalité virtuelle. Cette expérience muséale extra muros permettra non seulement aux aînés de renouer avec des éléments de leur enfance ou de leur adolescence, mais aussi à l’institution muséale de recueillir de précieuses informations et de bénéficier du vécu de ces témoins privilégiés afin de contribuer à la préservation d’une mémoire collective.

Rachel, très enthousiaste devant ce projet d’envergure, souligne que cette stimulation des souvenirs pour les personnes âgées pourra également contribuer à leur suivi médical, alors que les travailleurs sociaux pourront fort probablement utiliser les souvenirs ravivés comme leviers d’intervention. Si le mandat de l'École du Rang II est de préserver le passé, l'avenir demeure bien rempli pour l'institution muséale et son équipe.

École du Rang II
269, Rang 2 (Route 111)