Molly Bertrand – Lier l’arbre à l’humain

Par Gabrielle Izaguirré-Falardeau

Jusqu’au 31 juillet 2023, l’artiste rouynorandienne Molly Bertrand présente au public sa première exposition professionnelle intitulée L’appareil végétatif humain. Réalisée dans le cadre du programme d’emploi étudiant offert chaque année par L’Écart, incontournable centre d’artistes du Vieux-Noranda, l’œuvre propose une réflexion sur les liens et les ressemblances qui unissent l’humain à son environnement végétal. Portrait de cette jeune artiste prometteuse et de sa démarche artistique.

Un rapport intime à la nature

Fascinée par la biologie et le monde vivant qui l’entoure, Molly tenait à créer une œuvre sensible et évocatrice, stimulant la curiosité des visiteurs et incitant ces derniers à questionner leur rapport à la nature. Il en résulte une installation unique, spécifiquement adaptée au site, et réalisée dans un souci d’esthétisme assumé.

À partir d’un socle central couvert de mousses végétales qui s’étendent sous forme de racines et sur lequel sont posés des champignons cultivés en cours de création, l’artiste met en évidence le concept d’appareil végétatif, soit un dispositif qui permet la croissance d’une espèce, et non sa reproduction. Par exemple, pour le champignon, il s’agit du mycélium; pour l’arbre, des racines et des branches.

Quel est alors l’appareil végétatif humain?

Qui, ou quoi, en nous ou autour de nous, permet notre croissance et notre développement? Selon Molly, il pourrait s’agir, entre autres, des parents, de celles et ceux qui nous élèvent et nous guident à travers les âges.

Effectivement, par la confection de son œuvre, l’artiste souhaitait représenter un arbre mère et ainsi porter l’attention du public sur le rôle essentiel de chaque élément constitutif de notre environnement naturel. Elle fait le pari qu’en établissant un rapprochement entre les différents éléments de la nature et les êtres ou les choses qui nous sont chers, on sera plus à même de prendre soin de la nature qui nous entoure.

Ce soin porté à la nature a d’ailleurs fait partie intégrante de la démarche de Molly, qui s’est assurée de recueillir ses mousses dans des endroits stratégiques et en en quantité raisonnable, pour éviter d’affecter les écosystèmes. Elle s’assurera également de les redonner aux forêts d’où elles viennent pour leur permettre de poursuivre leur vie extérieure. D’ici là, elles sont arrosées chaque jour, dans une véritable démonstration du caractère vivant de l’œuvre.

Un art en constante évolution

Molly présente depuis son tout jeune âge un intérêt et un talent marqués pour les arts plastiques, qu’elle a pratiqués tout au long de sa scolarité primaire et secondaire. Après un bref détour en techniques de travail social, elle s’est rendue à l’évidence que sa place se trouvait dans la création et s’est inscrite au DEC en arts visuels au Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue : « Là, c’était vraiment formidable! », s’exclame-t-elle en se remémorant son parcours.

Comme pour lui confirmer qu’elle se trouvait effectivement sur la bonne voie, sa démarche a été remarquée et récompensée une première fois par l’équipe de L’Écart, qui lui a remis une bourse lors de l’exposition des finissant.e.s, en 2022. Audrée Juteau, directrice du centre d’artistes, souligne qu’elle avait remarqué, à l’époque, la cohérence d’une thématique à travers le corpus, en plus d’un rapport sensible aux matériaux.

Une belle lancée qui se poursuit pour Molly Bertrand

Maintenant étudiante au baccalauréat en arts visuels et médiatiques de l’UQÀM, Molly souligne que ses années d’étude lui ont permis de réfléchir son rapport aux matériaux et aux thématiques exploitées, en plus d’approfondir l’analyse de son propre travail.

Elle se penche aujourd’hui sur les thèmes de l’hypersensibilité, du rapport au temps, des relations, de la spiritualité, de l’anthropomorphe et de la comparaison entre l’humain et la nature, toujours en s’inspirant de sa région d’origine, avec laquelle elle entretient un lien solide et profond. Par sa « volonté extrême d’apprendre », Molly cumule les connaissances sur son milieu et tente de les intégrer à son processus créatif.

Une occasion en or

Comme la réalisation de L’appareil végétatif humain s’est faite dans le cadre du programme d’emploi étudiant de L’Écart, Molly a pu bénéficier d’un accompagnement professionnel et de nombreux apprentissages dans le développement de son projet.

Cet apport est toutefois mutuel. Pour Audrée Juteau, le fait de recevoir chaque année des artistes de la jeune relève permet à L’Écart de maintenir un contact avec cette communauté et parfois d’attirer un public différent sur les lieux, par exemple lors des vernissages.

Celui de Molly, qui s’est déroulé en même temps que les sorties de résidence de Laura Demers et Denis Taman Bradette, et Béatriz Mediavilla, a d’ailleurs été un succès, alors que des dizaines de personnes s’y sont présentées malgré la canicule qui avait cours à ce moment. Pour la première fois, Audrée avait choisi d’exposer une étudiante aux côtés d’artistes établis, ce qui a permis de riches échanges entre les exposant.e.s.

Pour Molly Bertrand, c’était une première expérience, mais certainement pas la dernière!

Cette première expérience en milieu professionnel est loin d’être anodine dans la façon dont Molly envisage la suite des choses : « Être exposée dans un milieu reconnu, ça me permet d’appliquer à des bourses et des subventions pour mes prochains projets. J’ai pu rédiger un texte sur ma démarche, un CV artistique, tout ça augmente mes chances de pouvoir participer à l’exposition des finissant.e.s de mon programme. » C’est donc avec une confiance renouvelée en elle et en sa démarche artistique que la jeune artiste envisage un l’avenir.

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• Quoi ? L'exposition L’appareil végétatif humain de Molly Bertrand.
• Quand ? Dès aujourd'hui et jusqu'au 31 juillet 2023.
• Où ? L'Écart de Rouyn-Noranda.