Par Sophie Médiavilla-Rivard
Catherine Perreault signe un premier roman coup de poing avec L’ÉLU. L'œuvre est parue le 21 avril dernier aux Éditions du Quartz. L’autofiction suit Isabelle, une mère au cœur émietté par l’autisme de son fil. Celle-ci est déchirée entre tout ce qu’elle lui donne et ce qu’elle ne peut pas lui offrir. Les mots de l’autrice, justes et crus, permettent de plonger avec empathie dans cette réalité violente, mais chargée d’un amour inconditionnel.
L'ÉLU, un partage sans pudeur
« L’histoire d’Isabelle et celle de son fils ressemblent beaucoup à ce que moi je vis avec mon enfant » admet d’emblée Catherine Perreault. Celle-ci a près d’une vingtaine d’années d’expérience en adaptation scolaire.
Dans le cadre de son livre, l'autrice se commet à un partage total. Le réalisme avec lequel sont racontés les comportements d’Élie, le fils de son alter ego, est frappant. Ainsi, les scènes sont profondément humaines et leur lecture touche droit au cœur. De cette façon, Catherine met en lumière des moments de détresse propre au trouble du spectre de l’autisme.
En conséquence, L’ÉLU relate le deuil d’Isabelle. Celle-ci est forcée de se séparer de son garçon lorsqu’il est emmené dans un centre spécialisé. Le corps et l’âme malmenés entre Amos et Rouyn-Noranda, Isabelle vit une déchirure profonde qu’aucun pansement ne semble pouvoir guérir. Heureusement, l’ampleur de ce deuil s’apaise alors qu’il est mis en parallèle avec « la naissance [d’une femme] qui se choisit, qui va finalement vivre sa vie, sans la présence de l’enfant », décrit la double finaliste du Prix du récit de Radio-Canada.
«
L’histoire d’Isabelle et celle de son fils ressemblent beaucoup
à ce que moi je vis avec mon enfant.»
CATHERINE PERRAULT
L’écriture comme exutoire
En effet, c’est en 2020 que la participante aux collectifs Abitibi-Montréal a entamé la rédaction de L’ÉLU. « J’ai voulu que ce processus d’écriture soit, de toutes les manières possibles, un processus de guérison » partage-t-elle.
En vue de prendre soin d'elle lors de cette démarche difficile, l'autrice de Prendre Pays s'est isolée quelques jours dans un chalet pour rédiger confortablement. Aussi, elle y a apporté du bon vin et y a cuisiné des repas réconfortants.
De surcroît, le roman l’a obligé à revivre des souvenirs douloureux dans toute leur intensité. « Ça a été un moyen de libérer certains mots, certaines images qui me restaient pris dans la tête. Parce qu’on a beau en parler à notre famille, nos amis, reste que nous, on le vit jour après jour, puis à un moment donné, on dirait qu’on n’a plus envie d’en parler » confie Catherine Perreault.
« L’une des choses qui m’ont le plus manqué dans ma communication avec mon enfant, c’est de pouvoir discuter avec lui » zjoute l’autrice de Distance. Dans cet ordre d'idée, elle a abordé son roman comme une lettre. Ainsi, elle s'est permis de raconter à son fils tout ce qu’elle n’a jamais pu lui dire, et que lui ne lira jamais.
Le soutien d’une communauté
« Noranda. La route 117. La côte Joannès. » Chaque jour, la protagoniste fait la route entre Rouyn-Noranda et Amos pour voir son fils et traverse ces repères spécifiques à l’Abitibi-Témiscamingue. « J’ai décidé de ne pas dépayser le personnage principal et de le coller dans un univers habituel, parce que c’est ce que je connais, ce que j’ai vécu », explique Catherine Perreault.
Également, elle voulait brosser le portrait d’une communauté régionale bienveillante et chaleureuse. « Les gens venaient déneiger mon entrée, me porter un sapin de Noël le 24 décembre parce qu’ils savaient que j’étais complètement dans l’urgence. Ce n’étaient pas toujours des amis ou de la famille, c’étaient des gens qui étaient touchés par mon histoire » se remémore Catherine Perreault. Pour elle, le roman est une manière de remercier ces bons samaritains témiscabitibiens.
Enfin, Catherine surfe actuellement sur la « belle vague » qui la submerge depuis le lancement de L’ÉLU. L'autrice compte bien continuer de baigner dans le milieu littéraire. Dans cet esprit, sa plume teintera notamment le prochain collectif des Éditions du Quartz, portant sur l’œuvre de Richard Desjardins.