Depuis un quart de siècle, le Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or porte fièrement la Semaine d’actions contre le racisme, un événement phare de sensibilisation et de mobilisation. En 2025, cette édition revêt une signification particulière, marquant à la fois le 25e anniversaire de la Marche Gabriel-Commanda et le 50e anniversaire du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or.
Un rendez-vous incontournable
Du 17 au 21 mars, une série d’activités met de l’avant l’importance de l’inclusion, du respect et de la solidarité. Le point culminant de la semaine est sans contredit la 25e Marche Gabriel-Commanda, qui rassemble la communauté le jeudi 20 mars 2025. Pour l’occasion, les deux porte-paroles de la Semaine d’actions contre le racisme, Biz et Samian, seront présents. Également, les porte-paroles vont à la rencontre des élèves de Val-d’Or afin de discuter d’ouverture et de diversité.
« Beaucoup de jeunes adultes qui y participent aujourd'hui étaient enfants lorsqu'ils ont marché pour la première fois. Maintenant, ils reviennent avec leurs propres enfants. » Pour Édith Cloutier, cette marche est un « outil de changement social, sociétal et transformateur. »
Édith Cloutier, directrice générale du Centre d'amitié autochtone de Val-d'Or
Une mobilisation collective

Cette Semaine d’actions contre le racisme est le fruit d’une précieuse collaboration entre plusieurs partenaires locaux, dont la Ville de Val-d’Or, le Centre de services scolaire de l’Or-et-des-Bois (CSSOB), l’UQAT, le Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue, l’école Golden Valley et la Chambre de commerce de Val-d’Or. Tous unis par un même objectif : bâtir une communauté plus inclusive et sensibiliser à l’impact du racisme au quotidien.
Dans ce contexte marquant, nous avons rencontré Édith Cloutier, directrice générale du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or, pour revenir sur l’évolution de cette initiative et les défis encore à relever.
Entrevue avec Édith Cloutier
25 ans de mobilisation – La Semaine d'actions contre le racisme en est à sa 25e édition. Quel regard portez-vous sur l’évolution de cette initiative depuis ses débuts? Quelles avancées majeures avez-vous observées?
« Ce qui est magique, après 25 ans, c'est que nous sommes maintenant dans l'intergénérationnel. » Depuis la première édition de la Semaine d'actions contre le racisme, la mobilisation a pris de l'ampleur. Ce qui était au départ une simple marche est devenu un mouvement porté par toute une communauté, des tout-petits en CPE jusqu'aux universitaires.
La genèse de cette initiative remonte à un épisode marquant. « Il y a 25 ans, je suis entrée dans un commerce et j'ai entendu la propriétaire dire à un employé : "Enfin, on s'est débarrassé de nos Indiens." » Plutôt que de quitter l'endroit fâchée, Édith Cloutier a pris l'initiative d'engager la conversation et de proposer une rencontre de sensibilisation. « C'est là que j'ai mobilisé mon équipe et qu'on a décidé d'organiser une marche pour dire non au racisme. »
Aujourd'hui, la Marche Gabriel-Commanda rassemble jusqu'à 1 600 personnes. « Beaucoup de jeunes adultes qui y participent aujourd'hui étaient enfants lorsqu'ils ont marché pour la première fois. Maintenant, ils reviennent avec leurs propres enfants. » Pour Édith Cloutier, cette marche est un « outil de changement social, sociétal et transformateur ».
Marche Gabriel-Commanda – Cette année marque aussi les 25 ans de la Marche Gabriel-Commanda. Pourquoi cet événement est-il si significatif pour la communauté et comment a-t-il évolué au fil des ans?
« On tient quelque chose qui se démarque par son continuum, par le fait que ça ne s’essouffle pas et dont le message est toujours renouvelé. » Explique Édith Cloutier.
Avec le temps, la Semaine d'actions contre le racisme a élargi son horizon.
« Nous avons dépassé la simple question autochtone. Nous accueillons maintenant des membres des communautés issues de l'immigration, ce qui apporte de nouveaux enjeux et enrichit nos discussions. »

Le Centre d'amitié autochtone de Val-d'Or, qui porte cet événement, a toujours eu pour mission le rapprochement des peuples.
« Nous ne parlons pas seulement d'améliorer la qualité de vie des Autochtones, mais aussi de réconciliation. »
Cette année, tous les grands événements phares sont sous la signature du 50e anniversaire du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or. Le centre a été fondé en 1974. « On trouvait important que notre organisation, qui fait partie d’un vaste mouvement qui vient des autochtones et pour les autochtones. L’aspect de nos actions est teinté de cette histoire qu’on veut rappeler.»
« On ne peut pas changer le monde tout seul. C'est en ouvrant le dialogue que l'on fait avancer les choses. »
Édith Cloutier
Engagement des partenaires – La Semaine repose sur une forte mobilisation de divers acteurs locaux. Comment percevez-vous leur engagement et leur rôle dans la lutte contre le racisme?
Pour Édith Cloutier, la lutte contre le racisme doit être portée par toute la société. « On ne peut pas changer le monde tout seul. C'est en ouvrant le dialogue que l'on fait avancer les choses. » Différents acteurs locaux, de la Chambre de commerce aux entreprises minières, s'impliquent dans des stratégies de réconciliation économique.
Les institutions sportives ne sont pas en reste. « Les Huskies de Rouyn-Noranda et les Foreurs de Val-d'Or dédient un match à la réconciliation. Même les Canadiens de Montréal organisent un match en hommage aux Autochtones. Chaque année, nous emmenons des jeunes vivre cette expérience. »
Le CN, un des commanditaires majeurs, a carrément mis en place une direction des relations avec les autochtones. En ce sens, ils ont une équipe dont le but est de faire du recrutement d’employés autochtones. « On est vraiment dans cette vision des relations renouvelées avec les autochtones, sous le grand parapluie de la réconciliation. »

Sensibilisation auprès des jeunes – Les porte-paroles de cette édition iront à la rencontre des élèves. Comment voyez-vous l’impact de ces échanges sur la jeunesse et pourquoi est-il essentiel d’éduquer les jeunes sur ces enjeux?
L'implication des jeunes est un axe central de la Semaine d'actions contre le racisme. « Les écoles sont devenues les principales porteuses du message. » Les enfants préparent leurs pancartes en classe, et pour plusieurs, participer à la marche est leur premier geste citoyen.
« L'année dernière, un danseur de cerceaux a expliqué ce qu'était un régalia. Il y avait un silence total dans la salle. Ces échanges laissent une marque. »
Le Centre d'amitié autochtone travaille à fournir des outils aux enseignants pour sensibiliser les jeunes. « On voit déjà les résultats : ceux qui ont marché avec nous il y a 25 ans sont aujourd'hui médecins, infirmiers, enseignants. C'est fascinant ! »
Prochaines étapes – Avec le 50e anniversaire du Centre d’amitié autochtone de Val-d’Or cette année, quelles sont les grandes priorités pour la suite? Comment souhaitez-vous que la lutte contre le racisme évolue dans la région?
Avec le 50e anniversaire du Centre d'amitié autochtone de Val-d'Or, Édith Cloutier souhaite voir la Semaine d'actions contre le racisme rayonner encore davantage. « Ce n'est pas qu'un événement de Val-d'Or, c'est une cause qui concerne toute l'Abitibi-Témiscamingue. Nous aimerions que chaque MRC s'implique. »
Pour marquer ce cinquantenaire, l'équipe a fait appel à des porte-paroles engagés. « On voulait frapper un peu plus fort et faire entendre notre message encore plus loin. »
Après 25 ans de marche et de sensibilisation, l'objectif reste le même : créer une société plus équitable, un pas à la fois.

Photo de couverture : Paul Brindamour