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S’amuser avec son terroir – Le Prospecteur – Abitibi-Témiscamingue

par Sarah-Emilie Nault

Remettre le terroir à l’avant-scène et stimuler la fierté des gens de l’Abitibi-Témiscamingue : voilà les fondements de la microbrasserie Le Prospecteur.

On retrouve de tout sur la 3e avenue historique de Val-d’Or : des pharmacies, des magasins de musique, des restaurants italiens, des optométristes, des banques, une charcuterie, des hôtels. Tous les services y sont. Du haut de la terrasse ensoleillée de la microbrasserie Le Prospecteur, on a une belle vue sur tout le bouillonnement qui anime cette artère centrale de la MRC de la Vallée-de-l’Or.

Située entre l’église Saint-Sauveur et l’épicerie fine La Tanière, la microbrasserie Le Prospecteur, fondée en 2014, est devenue ce lieu de rencontre incontournable où résidents comme visiteurs s’arrêtent pour vivre un vrai contact entre producteurs et consommateurs tout en savourant les légendaires saveurs boréales. Par un beau jeudi après-midi d’été, le pub et la boutique sont achalandés, manifestement devenus des endroits clés pour les gens du coin.

Élixir boréal

Jonathan Deschamps, dynamique et sympathique copropriétaire originaire de Lebel-sur-Quévillon, est passionné des épices boréales depuis son enfance vécue en Abitibi-Témiscamingue et dans le Nord-du-Québec : une région reconnue pour ses mines et sa forêt. Il ira même jusqu’à dire que la forêt lui coule dans le sang. Il allait donc de soi que le maître-brasseur et son comparse Philippe Lord fassent la part belle à cette boréalité dans leur entreprise comme dans leurs créations brassicoles.

« Depuis l’arrivée de l’industrialisation, on a perdu le contact avec le produit, surtout avec les produits miniers, car avec l’or, on ne voit jamais le produit final qui se retrouve dans un coffre-fort, explique celui qui jubile lorsqu’il se rend en forêt cueillir des produits boréaux. C’est un peu aliénant de ne pas avoir le contact entre le producteur et le consommateur. Il n’y a pas beaucoup d'agroalimentaire en Abitibi, on est une région très industrielle. Pourtant, ça ajoute tellement de valeur à notre région. »

Cette boréalité - cette saveur boréale abitibienne - est un concept très méconnu et souvent sous-utilisé selon le maître-brasseur. « Il faut connaître les épices, aimer aller dans le bois et aimer y accorder de l’importance, dit-il. Ce n’est qu’un début, il y a encore beaucoup de travail à faire. Elle est là, la mine d’or. »

C’est cette envie d’ouvrir son carnet de cueillettes afin de partager ses découvertes aux gens qui l’a poussé à réaliser ce « rêve de jeunesse plus ou moins sérieux » de plonger dans sa propre aventure brassicole. Il a quitté son boulot d’ingénieur - après des études à l’Université de Sherbrooke où il a rencontré son futur associé Philippe - et a tout lâché pour se mettre à créer de petites merveilles d’IPA aux fleurs de thé du Labrador ou encore une bière milkshake IPA au mélilot blanc.

« Mon travail en environnement dans les mines en Abitibi me branchait plus ou moins, confie-t-il. Ça manquait d’authenticité et ça me manquait de toucher au produit. Pouvoir créer quelque chose de local et d’artisanal est vraiment quelque chose qui nous tenait et nous tient encore à cœur. » C’est dans le sous-sol du pub, parmi les barriques et les cuves, que Jonathan et ses employés brassent leurs expérimentations. Parmi les classiques, il y a l’IPA américaine La Tête de pioche, vendue en format growler, et parmi les plus excentriques, il y a l’Hystérésis, une bière de blé légèrement acidulée qui contient 19 légumes et 2 fruits.

Fiers de leur terroir

Aujourd’hui, l’artisan-entrepreneur fait pousser son propre houblon et se plaît à s’associer avec des entreprises locales et diverses microbrasseries à travers le Québec. Dans ce même esprit de collaboration, ce sont des fermes locales qui le fournissent tantôt en miel, tantôt en grains.

Le pub du Prospecteur, il le qualifie d’âme de son entreprise qu’il voit comme une grande famille composée des employés et des clients. Aux fidèles clients abitibiens viennent se frotter de nombreux visiteurs provenant d’autres régions du Québec et d’ailleurs et dont les élogieux commentaires contribuent à faire rayonner Val-d’Or à l’extérieur de son vaste territoire. « Le tourisme brassicole a pris une ampleur phénoménale depuis 5 ans, constate Jonathan. Ma plus grande fierté dans tout ça c’est quand quelqu’un vient ici et nous dit : “C’est vraiment malade ce que vous avez fait.” »

Il y a deux ans, Le Prospecteur a ouvert son magasin général. Les visiteurs s’y arrêtent pour se procurer des produits dérivés branchés et des bières pour emporter, après avoir dégusté au pub le résultat de quelque 200 recettes de bières artisanales aux fiers arômes boréaux de celui qui travaille depuis 4 ans sur une bière 100% locale. « Elle sera composée d’orge du Témiscamingue, de miel, de levures isolées et de houblon que je fais pousser chez moi, dans ma houblonnière, et d’une grande fierté des produits venant de chez nous. »

Voilà un fier ambassadeur qui, par sa curiosité et sa créativité hors pair, a gagné ses lettres de noblesse dans une industrie explosive. Par ses efforts, Le Prospecteur compte parmi les microbrasseries les plus appréciées au Québec aujourd’hui.