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Stéphanie Brousseau : Chasse, trappe et pêche au féminin

J’ai rencontré Stéphanie Brousseau en visioconférence, entre deux cours, en direct du pavillon E1 de l’Université de Sherbrooke. Ma caméra refusait de fonctionner et le son était de qualité questionnable, mais même à travers ces circonstances suboptimales, à peine quelques secondes ont suffi à me faire saisir l’ampleur de l’énergie et de la passion qui animent Stéphanie. Avec des yeux pétillants et un débit enthousiaste (!), elle a partagé avec moi l’amour qu’elle porte à la faune régionale sous toutes ses facettes, mais surtout à la trappe, la chasse et la pêche au féminin.

La nature, une affaire de famille

Originaire de Matagami, dans la région de la Baie-James, Stéphanie a été initiée très tôt à la chasse et à la pêche, des activités qui s’inscrivent, chez elle, dans une véritable tradition familiale : « Quand tu nais dans une ville comme Matagami, à 200 kilomètres de la ville la plus proche, c’est du bois [partout]. Mes parents ont toujours chassé et pêché ensemble depuis qu’ils se connaissent, donc ils nous ont élevés, ma sœur et moi, dans la chasse et la pêche. »

"Beaucoup de femmes vont faire le tannage et la confection. Ce sont des étapes après la trappe, qui n’ont pas rapport avec la trappe, mais les femmes se rendent compte qu’elles sont capables d’aller chercher elles-mêmes leur ressource première alors pourquoi elles l’achèteraient? Elles font tout de A à Z."

Stéphanie brousseau

C’est d’ailleurs en partie cette passion qui a motivé son retour dans la région, après un détour en Outaouais : « Ma famille chassait en Abitibi alors je faisais souvent la route pour revenir chasser. Le pire c’est qu’en Outaouais, il y a plein de places pour chasser, pêcher, tout ça, mais moi c’est vraiment une affaire familiale, des valeurs familiales. C’est ça qui m’a fait revenir ».

Aussi, elle trouve plusieurs qualités spécifiques à la faune régionale, comme la proximité de certaines espèces moins communes ou accessibles ailleurs, tels le lynx, l’orignal ou encore l’ours noir.

Stéphanie est debout dans sa tour de chasse, baignée dans une lumière jaune de fin de journée. Elle porte un habit de camouflage.

L’intérêt de Stéphanie pour la chasse et la pêche s’inscrit aussi dans une fascination beaucoup plus large pour la nature et son observation : « J’admire la nature. Un écureuil j’en ai vu des millions dans ma vie, mais à chaque fois que j’en vois un je suis comme "aonh", pis là j’arrête et je l’observe. Ce qui m’a amenée à trapper aussi éventuellement, c’est ça, c’est l’observation de la nature, essayer de comprendre les comportements, autant des arbres que des animaux. Quand je suis dans le bois, moi, je ne m’ennuie pas! », affirme-t-elle joyeusement.

Démocratiser la trappe

Depuis 2018, Stéphanie s’adonne à la pratique méconnue de la trappe. Cette pratique peut paraître rebutante pour certain.e.s,, elle joue pourtant un rôle essentiel dans la préservation de nos écosystèmes et de leur équilibre. Effectivement, les trappeurs du Québec sont considérés comme des gestionnaires des animaux à fourrure. Celleux-ci ont, entre autres, la mission de contribuer au contrôle des prédateurs.

De cet ordre d'idées, Stéphanie m’explique que la diminution du nombre de trappeurs nuit à la protection de certaines espèces. Il s'agit d'une relation cause à effet très simple; les prédateurs se retrouvent en quantité trop élevée. En ce sens, Plusieurs efforts de sensibilisation ont cours actuellement à travers la province. Le but étant d'assurer la sensibilisation et la formation d’une relève.

Le respect de l'animal et les pratiques artisanales

De surcroît, la pratique du piégeage implique également la valorisation de l’animal, un aspect très cher à Stéphanie. « Ça passe d’abord par le respect de l’animal. Il faut savoir bien récolter la prise pour ne pas abîmer la fourrure » explique mon interlocutrice.

Ensuite, le plus de parties possible de l’animal sont utilisées à des fins diverses. À titre d'exemple ; le crâne et les griffes sont utilisés pour l’artisanat, ou encore la viande pour cuisiner de délicieux ragoûts qui font développer des goûts inusités.

« Ma viande préférée c’est rendu le lynx! », s’exclame Stéphanie.

Stéphanie se tient debout, dans une cuisine, devant une machine à faire des saucisses. Elle y met de la viande crue d'une main et fait un pouce en l'air de l'autre.

De cette façon, la trappeuse s’adonne aussi à certaines pratiques artisanales comme la tannerie, la couture ou la confection de bijoux à partir de cuir de queue de castor. Cette matière est mal-aimée et Stéphanie aime lui donner un caractère plus délicat.

La trappe : Une communauté unique

Ajoutons que l’apprentissage de la trappe exige rigueur, patience et curiosité. Bien qu’une formation obligatoire doive être suivie, les prises ne sont pas réussies du premier coup!

« C’est beaucoup d’essai-erreur. T’apprends à faire tes collets, à faire tes installations pis là ça marche pas… qu’est-ce que tu fais dans ce temps-là? Tu vas voir l’association des trappeurs régionale et tu vas demander aux vieux de la vieille qui font ça depuis toujours et ils te donnent dix millions de trucs. J’adore ça! », explique Stéphanie.

Stéphanie est dans un sentier enneigé avec ses deux chèvres et un traineau rempli de victuailles pour aller trapper. Une affiche, dans on traineau, indique "attention" Secteur de piégeage".

Bien sûr, les trappeurs et trappeuses forment une communauté précieuse et solidaire, ce qui, selon Stéphanie, contribue à la richesse de cette pratique.

La trappe au féminin

Fière de ses activités et désireuse de faire connaître l’art du piégeage à un public plus large, Stéphanie est administratrice du groupe Facebook Trappeuses du Québec. Cette communauté réunit exclusivement des femmes adeptes de cette pratique. 

« La relève de quarante ans et moins, c’est beaucoup des femmes […]. Les femmes aiment beaucoup utiliser la fourrure pour la transformer. Beaucoup de femmes vont faire le tannage et la confection. Ce sont des étapes après la trappe, qui n’ont pas rapport avec la trappe, mais les femmes se rendent compte qu’elles sont capables d’aller chercher elles-mêmes leur ressource première alors pourquoi elles l’achèteraient? Elles font tout de A à Z », précise-t-elle.

Stéphanie, à gauche de deux accolytes, sont au kiosque des Trappeuses du Québec. Devant elle, une table recouverte d'une nappe carreautée rouge et noire. Plusieurs items promotionnels se trouve sur cette table. À leur gauche, un grand parapost avec le logo des Trappeuses du Québec. L'affiche est aux couleurs de la nappe, soit carreautée rouge et noire.

Célébrer la région et son unicité

Stéphanie explique : « On se vante souvent que l’Abitibi c’est un grand terrain de jeu pour le plein air et moi je suis dedans tout le temps! Je suis une maniaque autant de kayak, que de randonnée que de tout. Moi j’ai la chance d’habiter en campagne alors tous les jours de ma vie je les passe dans le bois. Je comprends qu’il faut pas dire qu’on a juste des lacs pis du bois, on a une belle vie culturelle bouillante aussi en ville, j’adore ça! On valorise autant la culture que la nature et il y a de beaux combinés qui se font ici. Ce sont plein de petites passions que j’ai qui font que j’adore ça. »

Stéphanie se trouve devant un bel étendu d'eau qui reflète les couleurs pastels du ciel de fin de journée. Elle porte sur sa tête une casquette ornée de feuillage pour se camoufler dans le décors.

On comprend facilement que Stéphanie a plus d'une corde à son arc! La bachelière au programme de création nouveaux médias et en graphisme sait profiter au maximum de sa région, que ce soit avec la chasse, la trappe et la pêche au féminin ou encore en participant à la vie culturelle.

Si la chasse et la pêche vous intéresse, visitez notre section pourvoirie.

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